Saturday, March 03, 2012

SOMETHING ABOUT... LE POST DU WEEKEND 5



"Même si je ne sais pas lire, je sais ce que les hommes pensent de nous. L'un d'eux, qui prenait le temps jadis de nous nourrir mes amis et moi, nous confia la définition que l'on trouve dans les dictionnaires usuels.

Il est vrai que nous ne sommes pas décrits comme l'aigle, le rouge-gorge, la pie, ou la jolie colombe. Celle-là même qui, entre nous soit dit, n'est qu'une pâle copie de notre espèce. Retirez-lui sa blancheur pure qui lui vaut une place à certains mariages, et vous n'y verrez que du feu !

Nous, nous ne sommes que de simples oiseaux, que les passants n'admirent pas, à qui certains enfants jettent des pierres, et dont le sens figuratif signifie "être pris pour un idiot". Nous sommes aux yeux de tous, semblables à ces individus ordinaires, que personne ne considère vraiment puisqu'ils se fondent aussi bien dans le paysage hivernal, qu'un arbre dépourvu de ses feuilles.

Notre robe n'a rien de particulier, notre tête fait un drôle de mouvement lorsque nous marchons; c'est vrai, je vois les êtres humains nous imiter quelque fois en riant. Nos ailes sont courtes, ce qui ne nous permet pas de voler avec grâce vers un atterrissage élégant.

Nous sommes une espèce à l'allure empotée qui ne nous vaut pas l'oeil curieux des artistes.


Pourtant, je me souviens de ce jour-là. Une jeune femme s'est avancée vers nous, pendant que ma famille et moi profitions de quelques rayons de soleil pour nous dorer la croupe. Elle avait le regard attendri, mais pas de ceux qui retranscrivent la pitié, non ! Elle a chuchoté quelques mots doux, et s'est mise à fouiller dans son joli sac de cuir marron. Elle en a ressorti un appareil photo, et alors que certains d'entre nous se mirent à roucouler de scepticisme, elle nous dit qu'elle nous trouvait beaux, là, au bord de l'eau. Elle nous a demandé de rester naturel, de ne pas faire attention à elle.

Et je me souviens de cet instant magique comme d'hier, parce que ces quelques minutes d'attention me permettent aujourd'hui de vous confier ceci: je sais que l'être d'apparence le plus banal qui soit, mérite que l'on pose un jour son regard sur lui, et que l'on s'y attarde. Mais ceci, dans l'histoire des pigeons, jamais personne ne vous le dira."



Ecrit par
W. Marcel
Photo par Mlle Hofmann

No comments:

Post a Comment